- U.D.F.
- U.D.F.U.D.F. (Union pour la démocratie française)Lorsque Valéry Giscard d’Estaing est élu en 1974, il ne manque pas de fidèles, mais il n’a pas, ou presque pas, de parti. Certains de ses partisans, et non des moindres, expliquent, au lendemain de son élection, que celle-ci est due entre autres à l’absence d’une machine lourde qui éloignerait le candidat des Français, empêchant le dialogue direct avec les électeurs. De fait, la Fédération nationale des républicains indépendants est bien une structure légère et souple. Utiles pour le candidat, les R.I. font moins bonne figure lorsqu’il s’agit de devenir le parti du président. Dans un premier temps, le nouveau président de la République fait confiance à son Premier ministre, Jacques Chirac, pour «giscardiser» l’U.D.R., le parti gaulliste. Après la démission de Jacques Chirac et la création du R.P.R., en 1976, il est devenu clair que celui-ci, au lieu de devenir un appui pour le président, représente un danger pour lui.En septembre 1977, Jean-Jacques Servan-Schreiber annonce que le Parti républicain (le nouveau nom des R.I. avec lesquels ont fusionné Génération sociale et libérale et les comités de soutien à «V.G.E.»), le Centre des démocrates sociaux (l’héritier du M.R.P.) et le Parti radical qu’il dirige envisagent une alliance qui paraît dirigée autant contre l’opposition que contre le R.P.R. de Jacques Chirac. Ce dernier s’en prend à cette «manœuvre». Mais la personnalité de Jean-Jacques Servan-Schreiber, ses prises de position relativisent la proposition. L’affaire devient plus sérieuse au début de 1978. Lançant la campagne pour les législatives, Valéry Giscard d’Estaing distingue dans la majorité présidentielle deux courants: c’est implicitement appeler les partis autres que le R.P.R. à se regrouper. Le 1er février sont présentés les futurs candidats qui «pourront se référer à l’Union pour la démocratie française». Cette entrée discrète sur la scène politique n’empêche pas Jacques Chirac de s’élever deux jours plus tard contre cette «magouille partisane».L’U.D.F, qui a ajouté aux formations déjà citées le Parti social-démocrate et les clubs Perspectives et réalités, se comporte bien dans sa première bataille électorale: avec 21,45 p. 100 des voix au premier tour, elle devient d’entrée le troisième parti politique français, talonnant ainsi le R.P.R. et le P.S. Les dirigeants décident de constituer un groupe parlementaire unique avec leurs 137 députés et apparentés. Le C.D.S. qui, pour la première fois, dispose d’assez d’élus pour constituer un groupe autonome, hésite un instant. Malgré cela le groupe U.D.F. est finalement créé sous la présidence de Roger Chinaud, proche du président Giscard d’Estaing. Le 23 mars, l’U.D.F. désigne son président: Jean Lecanuet, président du C.D.S., homme surtout qui a soutenu Valéry Giscard d’Estaing dès la première heure en 1974. À ses côtés, les représentants des différentes composantes de l’union: le C.D.S., le P.R., les radicaux valoisiens, les sociaux-démocrates (M.D.S.F.) de Max Lejeune, ainsi que les clubs giscardiens Perspectives et réalités. Un homme aussi: Michel Pinton, polytechnicien proche du président et spécialiste des sondages, qui va exercer les fonctions de délégué général. Il est le seul dirigeant de l’U.D.F. qui ne soit affilié à aucun parti.L’U.D.F. a des électeurs, elle a des dirigeants, elle a aussi une doctrine. Démocratie française , l’ouvrage publié par le président, sera sa référence. L’intitulé du parti présidentiel renvoie très explicitement à ce livre.«La disparition des partis qui constituent l’U.D.F. n’aurait aucune importance.» Cette déclaration de Jean Lecanuet durant l’été de 1978 pêche, sans doute, par optimisme. Les partis modérés se déchirent depuis si longtemps. Il a fallu des conditions très particulières pour parvenir à cette alliance. Pour avancer et aller vers la fusion, que faudrait-il? Le débat sera incessant. Chacun des partis à son tour prônera la fusion ou s’y opposera, mais jamais tous en même temps.À l’occasion de son premier congrès, le 16 février 1979, l’U.D.F. veut apparaître comme le pôle réformiste de la majorité. Le congrès adopte une proposition qui va dans le sens d’un impôt sur le capital. Mais les esprits sont surtout préoccupés par l’élection au Parlement européen du mois de juin.À l’occasion du deuxième congrès (22-23 mars 1980), une étude de deux politologues, Colette Ysmal et Roland Cayrol, dresse le portrait du congressiste moyen: un homme d’âge mûr ayant fait des études supérieures, appartenant plutôt aux couches aisées de la population. Trois mois plus tard, en organisant la Fête de la liberté au Bourget, l’U.D.F. obtient un succès de masse, plus de 200 000 personnes en deux jours. Jean Lecanuet peut affirmer: «Nous sommes sortis des petits cénacles.» Malgré l’impopularité de la politique de rigueur du gouvernement Barre que l’U.D.F. doit soutenir, malgré l’échec des élections législatives partielles de novembre, l’avenir s’annonce plutôt bien.L’année 1981 devrait être celle de la réélection de Valéry Giscard d’Estaing à la présidence de la République. Mais les pronostics sont déjoués et l’U.D.F., qui avait été tenue à l’écart de la campagne présidentielle, doit aborder les législatives qui suivent dans les pires conditions. Les tendances centrifuges auront-elles raison de l’U.D.F.?Au conseil politique du 8 octobre, Jean Lecanuet et Michel Pinton sont réélus. L’U.D.F. continue donc, mais surtout elle marque à cette occasion son indépendance par rapport à son fondateur. En effet, Roger Chinaud, qui convoitait le poste de délégué général, est battu parce qu’il apparaissait comme un «sous-marin» de Giscard. À défaut d’éclater ou de se rallier à Jacques Chirac, l’U.D.F. se cherche un leader. Le 29 janvier 1982, Jean Lecanuet lance: «L’U.D.F. devra dégager de ses rangs un candidat à la présidence de la République.» Pendant les journées parlementaires de Salon-de-Provence, en septembre, les candidats se dévoilent: Valéry Giscard d’Estaing fait sa rentrée à la télévision et Raymond Barre se pose le lendemain devant les députés U.D.F. en présidentiable. Le C.D.S., qui craint que le congrès de l’automne ne soit utilisé par Valéry Giscard d’Estaing comme un tremplin, obtient son report à la fin de novembre. Ce qui n’empêchera pas Valéry Giscard d’Estaing d’y faire un triomphe en affirmant notamment: «L’U.D.F. doit devenir le mouvement central de la vie politique française.»L’U.D.F. a survécu à la défaite. Pour un parti politique, c’est une épreuve capitale. Elle prouvera sa vitalité au fil des échéances électorales qui suivent les déconvenues de 1981: élections cantonales (1982), municipales (1983), européennes (1984), législatives (1986) enfin où son alliance avec le R.P.R. assure la victoire des deux formations, l’avantage restant à la seconde. Mais, en cessant d’être le parti du président, l’U.D.F. est devenue le parti de plusieurs présidentiables. Le danger de divisions s’en trouve renforcé. Jean Lecanuet et Valéry Giscard d’Estaing sont écartés du gouvernement Chirac par François Mitterrand. François Léotard, leader du P.R., n’obtient pas le grand ministère qui lui permettrait d’asseoir ses ambitions. Raymond Barre, quant à lui, récuse toute idée de cohabitation. C’est lui que l’U.D.F. choisira pour défendre ses couleurs à l’élection présidentielle de 1988; mais l’ancien Premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing n’obtiendra que 16,54 p. 100 des voix, talonné par Jean-Marie Le Pen. Aux élections législatives qui suivent, l’U.D.F. s’en sort mieux que le R.P.R., avec lequel elle a constitué l’U.R.C., l’Union du rassemblement et du centre. Valéry Giscard d’Estaing succède à Jean Lecanuet à la présidence de l’U.D.F. Il conduira, en 1989, une liste R.P.R.-U.D.F. aux élections européennes. Les deux partis s’accordent pour gagner ensemble les élections législatives de 1993 et constituent, à cet effet, en 1990, l’Union pour la France. Derrière le R.P.R. mené par Jacques Chirac, l’U.D.F. prend sa part d’une considérable victoire: le Parti républicain place dans le gouvernement d’Édouard Balladur François Léotard, mais aussi Gérard Longuet et Alain Madelin; les centristes ont Pierre Méhaignerie, François Bayrou et peuvent considérer que le présence de Simone Veil, avec rang de ministre d’État, est un hommage à leur famille. Pour autant, l’U.D.F., si elle a su maintenir, dans le succès comme dans l’échec, sa cohésion en tant qu’organisation électorale, semble cantonner ses ambitions en deçà de la compétition présidentielle. À l’opposé notable du R.P.R., dont Jacques Chirac a toujours entendu qu’il lui servirait de soutien personnel dans son accession à la magistrature suprême, l’U.D.F. est, en 1995, incapable d’amener l’un des siens en position sinon de conquérir l’Élysée, du moins d’en faire la tentative. Les chefs historiques, s’ils n’ont pas toujours eux-mêmes renoncé à un destin national, ne suscitent pas une adhésion suffisante dans l’opinion et au sein même de l’U.D.F.; les plus jeunes, ex-«quadras», n’ont quant à eux pas acquis toute l’envergure qui conviendrait. En 1995, pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, la famille centro-libérale n’était pas représentée lors de l’élection présidentielle. À certains égards (limités), l’U.D.F. n’est pas sans évoquer ce «parti d’électeurs» que, selon le mot de Jean Charlot, constituait autrefois l’U.N.R.; mais celle-ci avait de Gaulle.L’U.D.F., elle, subit le double handicap d’avoir à se situer, à l’intérieur de la droite parlementaire, par rapport au R.P.R. et de concilier, en son propre sein, deux grands courants, l’un libéral, l’autre centriste, et un plus grand nombre de stratégies individuelles portées par François Léotard, Valéry Giscard d’Estaing, Alain Madelin et François Bayrou, pour ne citer que les plus notoires. Volonté de rénovation, manifestations d’indépendance et conflits de personnes constituent son lot après l’élection présidentielle de 1995. Soutenu par Alain Juppé, dont le gouvernement ne conservera pas longtemps la présence d’Alain Madelin, démissionnaire en août, François Léotard accède en juin à la présidence du P.R., tandis qu’en novembre de la même année, le C.D.S. présidé par François Bayrou se transforme en Force démocrate, abandonnant ses références chrétiennes. L’appui de François Bayrou permet, en 1996, à François Léotard d’être élu président de la confédération, succédant à Valéry Giscard d’Estaing qui, pour sa part, soutenait la candidature d’Alain Madelin. Le revers essuyé par la droite aux élections législatives anticipées de 1997 frappe durement l’U.D.F., qui voit sa représentation au Palais-Bourbon presque réduite de moitié, et en particulier le P.R., qui est devancé par la formation centriste. La menace d’éclatement est agitée. Avec rapidité et discrétion, les rôles se redistribuent au sein de la confédération: François Léotard conserve son mandat, François Bayrou renonce à former un groupe parlementaire distinct et prend la tête des députés U.D.F., Alain Madelin, enfin, devient président du P.R. bientôt rebaptisé Démocratie libérale.U.D.F.Sigle de Union pour la démocratie française.
Encyclopédie Universelle. 2012.